Les dessous des ratures

04 . 2014

Imed Jemaïel

Pour dépeindre leurs personnages, certains auteurs procèdent par  description de leur physionomie, de leur trait de caractère ou encore par la restitution littéraire de leur dessein ou pensée. Si par jeu ou par recherche du plaisir du contexte, je devais me  prêter à ce genre d’exercice, j’userai en premier lieu non des attributs physiques  de l’individu à décrire mais des objets consumés  par celui-ci. Il est, en effet, quelques  objets qui semblent définitivement scellés au corps d’une personne générant par ce lien unique des gestes voire des substances quasi organiques. Imed Jemaïel n’est pas un personnage de roman mais un ami et complice depuis  presque trente ans maintenant. Si l’on devait déplier  nos souvenirs  scripturaux communs, on pourrait y extraire  des milliers de phrases, des  centaines de feuillets, des millions de mots imprimés mais également et peut être surtout des mots en noir manuscrits, alignés  sur page blanche. Feuilles de papiers prédécoupés en format A4 et stylos à la pointe bien choisie  constituent à mes yeux, du moins avant l’exploration récente d’autres traceurs et supports tels que les stylos à chargeur acrylique  et la toile de coton ou de lin, la première famille d’objets intimes présentifiant au mieux l’artiste et distinguant son approche scripto-plastique. A portée de mains, de transport aisé, ces objets lui permettaient en tout temps  et  tout lieu, urbi et orbi  de faire la jonction entre le décodable,  dérivé de scriptura   et l’illisible, natif du   graphein.  

Extrait de texte de Nadia Jelassi

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