#Found&Lost

04 . 2016

Sil Kurmus

« Manger, boire, se laver, dormir, s’habiller, se raser, se brosser les dents, …, s’asseoir, se lever, se rasseoir, …, autant de gestes ponctuant notre quotidien et sollicitant la mécanique et la cinétique de nos corps. Désignés de communs, qualifiés de banals, de répétitifs, de monotones, de routiniers, ces actes triviaux rythmant nos jours et nos nuits, ces flux d’expériences physiques ne peuvent pas faire l’objet d’une liste aussi vertigineuse soit elle. Les circonscrire, les répertorier, les classer serait une entreprise non seulement ouverte aux doutes et à l’incertitude mais
surtout à l’exclusion.
Rien ne nous empêche en effet, de chanter en nous lavant, comme rien ne nous interdit de manger en discutant, de boire en téléphonant, de consulter notre courrier en marchant, de prendre une photographie ou de dessiner sur une tablette tout en étant confortablement assis sur une chaise ou sur un siège d’avion… Sous cet angle, le listage des gestes du quotidien s’avère ardu car convoquant des habitudes corporelles
stéréotypées, régies souvent par des traditions culturellement différenciées. Ce travail de listage exigerait aussi une mise à jour régulière qui intègrerait les nouveaux gestes générés par l’usage de nouveaux objets à peine imaginables il y a quelques années. S’invitant régulièrement dans nos vies et imposant de fait leur mode d’emplois, les objets / fruit de l’essor technologique réinventent non seulement nos manières d’être et de connaître mais peut être et surtout notre rapport au monde. Nos corps sont désormais reliés physiquement / mentalement et virtuellement à des claviers mais surtout à divers types d’écrans ouvrant / se fermant sur plusieurs mondes. Nos gestes évoluent, se meuvent en conséquence.
Enracinés dans un champ culturel ou nouvellement acquis, les gestes du quotidien n’excluent donc pas le partage ni la pratique des arts. Işıl Kurmuş nous invite à une immersion dans cet univers indéterminé, sans cesse mouvant du quotidien. L’artiste exposant s’est saisie de cette banalité apparente pour la transfigurer au travers d’un ensemble de propositions plastiques bidimensionnelles alliant l’imprimé et le dessiné à l’écran de son ordinateur et aux infinités de ses fenêtres. »

Extrait du texte de Nadia Jelassi

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